Au premier abord, le
papillon semble être la nage la plus technique et la plus difficile.
Dans la toute première version du livre « Le Guide du Crawl Moderne »
(publié en pdf sous le nom « Le Plaisir de Nager » paru en 2011 et
épuisé), j’avais consacré un chapitre à cette nage en y proposant une
approche, pédagogique, simple et facile pour se faire plaisir avec cette
nage.
A titre d’exemple de mise en pratique de ces
conseils, et pour ceux qui n’ont pas eu « Le Plaisir de Nager » entre
les mains (mais uniquement le Guide du Crawl Moderne), je vous restitue
ici le témoignage d’un lecteur qui a mis en pratique ces conseils pour
réussir pour ses 50 ans son premier kilomètre non stop en papillon.
Tout
comme en crawl, il existe plusieurs styles de papillon : le papillon
décrit par ce nageur et qui reprend les conseils de mon livre est une
nage facile à apprendre et à maîtriser et qui ne nécessite pas une
grande condition physique. Ce style ne conviendra pas au nageur qui
voudra nager un papillon plus sportif et rapide sur de courtes
distances. Voici son témoignage:
« Comme beaucoup, j’ai
appris à mieux nager sur le tard. Ce n’est qu’à quarante cinq ans passés
que je me suis à nager plus régulièrement ayant la chance et m’ayant
aussi imposé cette discipline si agréable d’aller deux à trois fois par
semaine à la piscine. Au tout début, je ne maîtrisais approximativement
que la brasse, puis au bout de plusieurs mois de pratique régulière, je
commençais à nager mieux le crawl.
J’avais
toujours rêvé de bien nager le papillon. C’est une nage qui faisait
envie car elle est à la fois puissante et fluide. Elle me semblait
toutefois inaccessible comme au commun des nageurs moyens comme moi.
Elle m’inspirait toujours une certaine appréhension. Elle me semblait
nécessiter une technique et une force que je ne possédais pas et que je
craignais de ne jamais pouvoir acquérir. Je l’avais donc mise totalement
de côté durant ces premières années de reprise de la natation.
Heureusement,
j’ai atteint un niveau très acceptable en crawl assez rapidement. Ma
brasse était un peu mieux aussi mais j’avais vite compris que des trois
nages que je pratiquais (NDLR : brasse, crawl et dos crawlé), c’était à
la fois la plus technique et aussi celle qui était la plus traumatisante
du fait des contraintes qu’elle faisait subir à mes genoux. Je me suis
aussi senti assez vite limité en dos crawlé, ressentant bien le manque
de souplesse de mes épaules, la quarantaine bien passée ; je réservais
donc cette nage à quelques longueurs par ci par là, le plus souvent pour
récupérer des longueurs de crawl.
Je
ne sais pas si c’est une certaine monotonie qui me poussa à vouloir
relever un nouveau défi mais je fus tenté, il y a un an, de maîtriser
enfin le papillon. Mon objectif était sans doute modeste à l’époque car
je ne visais que pouvoir enchainer 200m en papillon, soit 4 longueurs
dans ma piscine habituelle de 50 mètres.
Mes
premières tentatives furent assez frustrantes : je n’arrivais pas du
tout à finir une longueur de 50 mètres en papillon, alors que je
considérais ma condition physique tout de même plutôt bonne.
Enchaîner
ne serait ce qu’une dizaine de mouvements de papillon m’épuisait et il
m’était juste impossible de continuer après 30 ou 40 mètres !
Je
me replongeais dans ton livre et redécouvrais ce chapitre que j’avais
plutôt zappé lors de ma première lecture et je m’appliquais à suivre tes
conseils : le premier était d’apprendre à bien onduler, non pas en
force mais en souplesse et surtout aussi en utilisant tout le corps un
peu comme un « culbuto ». Comme recommandé, j’ai débuté l’apprentissage
de ce mouvement avec des palmes courtes ce qui m’a beaucoup aidé à
ressentir le bon mouvement. Je ne cherchais pas la propulsion mais la
sensation de bascule du corps se cassant au niveau du bassin. Je
m’appliquais à bien enfoncer mon torse dans l’eau pour ressentir en
retour la poussée de l’eau qui le faisait remonter. Je le faisais très
souplement, pas du tout en force (chose que mes vertèbres lombaires un
peu fragiles ne m’aurait pas permis quoiqu’il arrive). Ce mouvement fut
assez rapide à maîtriser : il ne fallut pas beaucoup de séances pour
cela.
Jusqu’à maintenant, mes bras n’avaient pas travaillé : je les avais laissés le long du corps pour travailler les ondulations.
La
troisième étape consistait maintenant à ajouter le mouvement des bras
en les lançant vers l’avant à chaque fois que mes épaules sortaient de
l’eau grâce à l’ondulation. Pour cela, je remis les petites palmes car
cela rendait plus aisé la sortie du haut du corps. (NDLR : en papillon,
on doit réaliser deux ondulations du corps pour un mouvement de bras).
Assez
vite, j’appris à placer ma tête ; la tête m’aidait à guider le
mouvement des épaules pour les enfoncer puis les faire ressortir :
j’inspirais l’air à chaque relevé de tête (et non pas tous les deux
relevés de têtes comme on voit souvent les bons nageurs de papillon le
faire). Je cherchais à sortir la tête le moins possible de l’eau : il
suffisait que ma bouche effleure la surface de l’eau pour me permettre
de prendre une inspiration. Relever plus haut le menton ne m’aurait
servi à rien et nécessitait un effort inutile.
Pour
les bras, je faisais au plus simple : plutôt que chercher à pousser
l’eau à la force de mes bras et de mon dos, je me contentais de les
lancer devant moi dès que mes épaules sortaient de l’eau. Je ne
cherchais pas à faire de trajet particulier avec mes mains sous l’eau :
je cherchais à faire au plus simple et surtout à lancer mes bras devant
moi de manière souple et relâchée.
Lorsque
j’avais essayé de commencer à nager le papillon, je me fatiguais
énormément en cherchant à pousser l’eau avec force. Très vite,
j’atteignais mes limites musculaires et c’est la raison pour laquelle je
n’arrivais pas à nager un longueur mètres d’affilée. C’était simple à
comprendre : vouloir pousser l’eau avec force avec les deux bras en même
temps en utilisant à la fois la force des bras et les muscles dorsaux
me demandait un effort très important, bien supérieur par exemple à ceux
exercés dans les autres nages : en crawl et en dos crawlé, où on ne
fait l’effort de pousser qu’avec un bras (jamais avec les deux bras en
même temps). En brasse, on exerce une pression sur l’eau avec les deux
bras mais le mouvement est bien moins puissant qu’en papillon. Comme tu
le disais, l’une des astuces pour être endurant en papillon est
d’utiliser les bras le moins possible. En cherchant juste à les lancer
devant moi, j’arrivais à me propulser sans trop de fatiguer, même si
évidemment je nageais moins vite qu’un nageur de papillon qui pousse
fort sur ses bras.
Donc si je résume,
contrairement à ce qu’on aurait tendance à vouloir faire en papillon,
j’utilisais peu l’ondulation afin de produire une réelle propulsion :
l’ondulation sert avant tout à permettre de sortir les épaules de l’eau
grâce à la poussée d’Archimède. Je me contentais juste d’enfoncer mes
épaules dans l’eau en cassant légèrement le bassin puis je laissais
remonter mes épaules pour lancer mes bras vers l’avant en sortant la
tête juste au raz de l’eau et pas plus haut.
Il
me suffit ensuite d’enlever les petites palmes pour réaliser à la fois
l’ondulation et le mouvement des bras de manière synchronisée. Je
m’aperçus aussi assez vite qu’en ralentissant la cadence des
ondulations, j’avais la possibilité d’inclure un instant de récupération
dans ma nage : je cherchais ainsi à rester plus longtemps sous l’eau
les bras tendus et relâchés. Je ne cherchais surtout pas à ressortir
très vite de l’eau. Ce timing s’avéra être l’une des clés pour me
permettre d’enchaîner les longueurs en papillon car il me permettait de
me relâcher entre chaque mouvement et donc de récupérer un petit peu.
Un
autre truc fut d’inclure un fouetté assez puissant des jambes, ce qui
m’évitait de trop solliciter mon bassin (et mon dos fragile). Appuyer un
peu plus avec les jambes en fin d’ondulation me permet de ressortir
plus facilement hors de l’eau et de gagner en longueur par coup de bras.
Quand je me sentais plus fatigué, je marquais moins ce coup de jambes.
A
chaque séance, j’incluais des séries en papillon avec pour objectif
d’atteindre 200m. Nageant dans un bassin de 50m, je procédais ainsi : je
faisais environ 15 ou 16 mouvements de papillon, ce qui m’amenait à
environ 35 mètres dans la longueur puis je finissais la longueur en
brasse. Cela me permit de ne pas devoir m’arrêter au mur pour me reposer
et de pouvoir repartir tout de suite pour une autre longueur. De séance
en séance, j’augmentais le nombre de mouvements de papillon par
longueur et réduisait la distance couverte en brasse. J’attends ainsi en
quelques séances mon objectif de 200 mètres.
Je
dois avouer que je prenais beaucoup de plaisir à nager la papillon de
cette manière : cela me procurait une grande sensation de glisse et de
relâchement. Je me dis qu’il fallait que j’arrive à nager 1.000 mètres
en papillon sans m’arrêter ; ce fut mon objectif pour mes 50 ans !
Je
suivis donc ma progression qui avait bien marché pour le 200m.
J’accumulais les longueurs en nageant chaque longueur en grande majorité
en papillon avec un peu de récupération en brasse. Au fil des séances,
j’augmentais la distance parcourue ainsi : 300 puis 400 puis 500 puis
600 puis 700 puis 800m. Une fois arrivé à 800m, je sentis que l’objectif
devenait atteignable.
Les séances
suivantes, j’enchaînais les longueurs en papillon mais en supprimant
toute brasse ; plutôt que récupérer en brasse durant la longueur, je
nageais toute la longueur en papillon mais prenait un court temps de
repos au mur. A chaque longueur, je comptais mes coups de bras pour
rester bien dans le rythme : je cherchais toujours à marquer un léger
temps d’arrêt au moment où je m’étirais sous l’eau et je m’appliquais à
bien enfoncer mes épaules. La conséquence était que je ralentissais
évidemment à chaque mouvement (au contraire d’une nage de papillon
rapide) mais que cet temps marqué d’enfoncement me permettait d’abord de
bien relâcher mes bras et de récupérer et aussi de bénéficier au
maximum de la poussée d’Archimède pour remonter mes épaules à la surface
avec peu d’effort musculaire. Mon papillon devenait ainsi très
économique, demandant le moins d’effort possible.
Grâce à tous ces trucs, je découvris ainsi une nage très agréable à nager, de manière souple et relâchée et toute en endurance.
L’objectif des 1000 mètres fut ainsi atteint au bout d’environ 2 mois, à quelques jours de mon 50ème anniversaire !!
NDLR:
En synthèse, voici donc les recommandations et astuces pour avoir un
papillon endurant ; ces conseils vont à l’encontre de ce qu’on conseille
pour avoir un papillon rapide :
– ne pas chercher à pousser l’eau mais chercher à plutôt à lancer les bras vers l’avant rapidement,
– utiliser la gravité/force d’Archimède pour remonter ses épaules à la surface ; au besoin, s’aider d’un fouetté des jambes.
– Marquer un très léger temps de relâchement au plus bas du mouvement, lorsque le corps est en position submergée et allongée.
– Inspirer à chaque lancer des bras vers l’avant.
Bonne nage !