jeudi 24 novembre 2016

Comment moins s'essoufler en crawl ?

Beaucoup d'athlètes sont terriblement frustrés en natation. Ils ont beau être en bonne forme physique dans des sports d'endurance (par exemple en vélo, en course à pied). Mais en piscine, ils ont beaucoup de mal à aligner les longueurs du fait d'un essoufflement prématuré.

Je vais chercher à en expliquer les raisons possibles les plus courantes :

Raison n°1 : le manque d'horizontalité dans l'eau :

La première cause de l’essoufflement est souvent liée à une trop grande traînée dans l'eau. Le plus souvent, cela vient du fait que le bassin et les jambes du nageur en crawl s'enfoncent trop par rapport aux épaules. Le nageur positionne ainsi involontairement son corps comme une ancre qu'il va devoir tracter, ce qui évidemment va considérablement augmenter son degré d'effort et le fatiguer.

La solution : il faut impérativement améliorer son équilibre horizontal dans l'eau ; vous trouverez pleins de conseils à ce sujet dans ce blog et aussi bien sûr dans le livre "Le Guide du Crawl Moderne". Cet équilibre se fait avant tout en accentuant l'enfoncement de la cage thoracique en roulis et en particulier de l'épaule sous-marine et également grâce à un judicieux timing des bras (les bras n'étant pas parfaitement en opposition). La position de la tête peut aussi jouer un rôle.

Raison n°2 : trop de battements de jambes :

Le battement de jambes peut être très consommateur d'énergie du fait de la masse musculaire des jambes. Si vous battez fort des jambes, vous allez augmenter considérablement votre niveau d'effort.

Si vous souhaitez garder un niveau d'effort modéré pour pouvoir nager longtemps sans vous essouffler, il est donc vivement conseillé d'avoir un battement de jambes le plus léger possible. D'ailleurs, le plus souvent, le battement de jambes du nageur récréatif lui apportera très peu de propulsion et augmentera beaucoup sa traînée. Le battement doit avant tout permettre aux jambes de rester près de la surface de l'eau dans la traînée du haut du corps. Pour réaliser cela, un battement léger et peu fatiguant doit suffire. 

La solution: apprendre à avoir un battement léger pour garder les jambes près de la surface sans chercher de propulsion grâce aux jambes. Cherchez à imaginer vos chevilles liées par une corde assez courte de sorte que vos pieds restent toujours assez près les uns des autres.

Superbe photo et position d'épaule ! (source: enjoy-swimming.com)
Raison n°3: trop d'amplitude :

Chaque nageur doit chercher à optimiser la distance parcouru par coup de bras. Cela ne veut pas dire forcément vouloir parcourir le plus de distance possible à chaque coup de bras car, pardon de d'enfoncer une porte ouverte, mais c'est fatiguant !

L'eau est un élément qui est extrêmement dense, plus de 800 fois supérieur à la densité de l'air. Imaginez-vous courir avec une très longue foulée ou avec un braquet très important à vélo : vous pensez bien que ce serait fatiguant, voire exténuant. C'est exactement la même chose en natation mais dans des proportions bien plus importantes puisque les frottements augmentent avec le carré de la vitesse; une petite variation de vitesse va donc générer beaucoup plus de force de résistance. 

En dépit de tout ce que vous avez peut être lu ou entendu ou cru percevoir de certaines vidéos, nager le crawl ne signifie pas chercher systématiquement à parcourir une très longue distance à chaque coup de bras. Cette distance doit être avant tout en rapport avec votre capacité aérobique. Si vous ressentez une fatigue et un essoufflement importants après plusieurs longueurs, c'est peut être que vous cherchez à trop forcer l'allonge à chaque coup de bras.

La solution: ne pas hésiter à réduire un peu sa distance par coups de bras si vous souhaitez pouvoir enchaîner les longueurs sans être essoufflé. Comment le faire? Essayez de trouver un nageur dans votre piscine qui nage un peu moins vite que vous et prenez son sillage. Cela va vous obliger à diminuer votre vitesse, donc soit votre cadence, soit votre amplitude, soit les deux. Essayez de jouer sur ces deux paramètres et jaugez votre ressenti. Si vous réduisez trop votre cadence, vous allez logiquement générer un temps mort dans votre nage (ce qui serait contre-productif car chaque temps mort oblige le nageur à plus réaccélérer à chaque coup de bras). En revanche, si vous réduisez votre amplitude sans réduire votre cadence ou quasiment, il est fort possible que vous atteignez justement ce niveau d'aisance respiratoire qui vous permettra d'enchaîner les longueurs. Si vous faites attention à votre ressenti musculaire, vous devriez sentir que vous forcez moins le mouvement, que vos muscles les plus sollicités (épaules, bras....) sont plus relâchés et que, donc, le degré d'effort est moindre. Au contraire, si vous sentez vos muscles étirés ou vos épaules chauffées, c'est que vous exagérez trop le mouvement. La encore, la recherche de bonnes sensations est très importante !

Bonne nage !










jeudi 3 novembre 2016

Total Immersion: the "Best Swimming Technology" ?



On entend assez régulièrement parler du crawl préconisé par Terry Laughlin, le fondateur et dirigeant de Total Immersion. Total Immersion est une société américaine  dont l'objet est d'apprendre le crawl (et les trois autres nages) à sa manière (soit disant révolutionnaire depuis une vingtaine d'années déjà).

Ce crawl, très largement inspiré du style australien (en Front Quadrant Swimming FQS), se caractérise par une nage qui insiste sur le roulis, la glisse, l'hydrodynamisme et non pas sur la force, la fréquence ou le battement de jambes.

C'est une forme de crawl qui met l'accent sur l'équilibre dans l'eau avec des mouvements simples et glissés. Elle insiste aussi beaucoup sur le rôle du corps dans son entier dans la propulsion plutôt que sur la seule force des bras. Le crawl Total Immersion ou "TI" peut se résumer à enchaîner la glisse d'un côté après l'autre en se laissant basculer de tout son long d'un côté sur l'autre sans effort apparent.

Le fait d'insister ainsi sur la glisse a donné lieu à des vidéos "impressionnantes" sur youtube, du genre nager 25m en 12 coups de bras. Ex: The Best Swimming Technology. Cela peut paraître contre-intuitif pour certains mais ce n'est pas parce que vous faites le moins possible de coups de bras par longueur que vous fatiguez moins. C'est même plutôt le contraire à partir d'un nombre de coups de bras. A partir d'un certain nombre, vouloir augmenter son amplitude par coups de bras devient très fatiguant.

Maintenant, le petit souci, c'est que certains semblent revendiquer que le crawl façon Total Immersion serait la "best swimming technology" (meilleure technologie de natation (!)). Si tel était le cas, alors comment se fait-il que les meilleurs nageurs mondiaux ne nagent pas de la sorte ?


Autre souci, c'est que quand on regarde la manière dont Terry Laughlin, l'inventeur même de cette méthode, nage une compétition en eaux libres de 3km, son crawl ressemble vraiment de très très loin au crawl glissé des vidéos de Total Immersion.

La nage du crawl possède deux particularités essentielles qui lui donnent un avantage décisif sur la brasse ou le papillon:
- il permet un mouvement de traction et d'appui sur l'eau continu sans arrêt (contrairement à la brasse et au papillon) ;
- le bras revient vers l'avant dans l'air et non pas dans l'eau (contrairement à la brasse).


Malheureusement, le crawl façon "Total Immersion" (comme nagée sur la vidéo "Best Swimming Technology"), de par une glisse accentuée et une entrée de la main dans l'eau très près de la tête ce qui accentue le trajet sous-marin de la main vers l'avant (un peu comme en brasse), supprime en grande partie justement ces deux particularités essentielles à l'efficacité du crawl.

A cela il faut ajouter que dès que l'eau n'est pas parfaitement lisse, vouloir beaucoup marquer la glisse devient vite problématique car on se retrouve très chahuté par l'eau; ce n'est pas pour rien si en eau libre les nageurs ont tendance à adopter une nage en opposition lorsqu'ils sont en groupe en particulier pour faire en sorte d'avoir des appuis constants sur l'eau.


Si on veut nager bien et efficacement en eaux libres, il faut retrouver et accentuer ces particularités. C'est d'ailleurs ce que Terry semble s'attacher à faire en compétition en eaux libres, comme la vidéo disponible sur son site le démontre.

En conclusion, je conseillerai aux nageurs de s'intéresser au style Total Immersion s'ils ont du mal avec l'horizontalité et ont du mal à nager souple et relâché. Ensuite, une fois ce style maîtrisé, je leur conseillerai de s'attacher à remettre un minimum de fréquence de bras dans leur crawl, à oublier cette entrée de la main très près de la tête et un bras trop pointé vers le fond du bassin mais à se concentrer avant tout sur l'enfoncement de l'épaule sous le menton (comme je le conseille dans le livre "le guide du crawl moderne").



Bonne nage !