Après avoir consacré beaucoup d'énergie et de temps à mon nouvel ouvrage, Light Feet Running, je reviens à mes premières amours avec un sujet dont le titre évocateur est presque digne d'un polar.
Je relisais l'excellent ouvrage de Didier Chollet "l'Approche Scientifique de la Natation Sportive" qui explique scientifiquement, dans un de ces chapitres, l'apport du battement de jambes.
Je relisais l'excellent ouvrage de Didier Chollet "l'Approche Scientifique de la Natation Sportive" qui explique scientifiquement, dans un de ces chapitres, l'apport du battement de jambes.
D'un point de vue propulsif, l'explication scientifique est simple:
- considérant que les bras génèrent une force de propulsion égale à X et les jambes génèrent une force propulsion égale à Y, la vitesse du nageur n'est évidemment pas égale à X+Y (ce serait trop beau!). Si X est supérieure à Y, les jambes freinent le nageur et évidemment plus X et Y sont proches, moins les jambes freinent le nageur.
- La force de propulsion des bras n'est pas constante mais sinusoïdale les bras n'exercent donc pas une force constante sur l'eau; au contraire, à certains moments dans le cycle de bras, la force est maximale (normalement lors du passage de la main sous-marine à l'aplomb de l'épaule) et à d'autres moments, elle est très faible voire nulle.
- De ce fait, il peut exister un moment dans le cycle de nage où Y devient supérieur à X (même durant un instant très court). C'est le cas en battement en six temps lorsque le nageur maintient un battement presque continu tout au long du cycle de bras.
En revanche, ce n'est pas le cas du battement 2 temps sauf à ce que le nageur place son battement au moment où la force de propulsion est la plus faible. Or, en battement 2 temps, c'est exactement l'inverse: le battement de pied est synchronisé avec le passage du coude sous-marin à l'appui de l'épaule, c'est à dire le moment où la force de propulsion est la plus grande. Donc en battement 2 temps, à aucun moment, Y est supérieur à X et on sait que X ne s'ajoute pas à Y. Alors pourquoi beaucoup de nageurs (par exemple Sun Yang, recordman actuel du 1500m) utilise très régulièrement un battement en deux temps ?
On sait que les meilleurs nageurs n'ont pas réellement besoin de battements de jambes pour maintenir leur corps parfaitement horizontal sur l'eau. Donc, si on se base sur une simple logique mathématique, Sun Yang, recordman du monde du 1500m nage libre, ferait mieux de ne pas utiliser ses jambes et se concentrer uniquement sur la propulsion grâce à ses bras. En économisant ainsi ses jambes, il aurait encore plus d'énergie pour ses bras. Pourtant ce n'est pas le cas !
L'une des explications possibles est une dimension sur laquelle on n'insiste pas en matière de battement. Je l’appellerai l'allègement.
Si on prend l'analogie de la course à pied, on peut constater qu'en utilisant ses bras et en les synchronisant avec l'appui du pied, le coureur à pied peut arriver à s'alléger, c'est à dire à générer une force qui limite son écrasement au sol. Pour mieux comprendre ce phénomène, en voici une description en course à pied prise sur le site www.volodalen.com:
Si on prend l'analogie de la course à pied, on peut constater qu'en utilisant ses bras et en les synchronisant avec l'appui du pied, le coureur à pied peut arriver à s'alléger, c'est à dire à générer une force qui limite son écrasement au sol. Pour mieux comprendre ce phénomène, en voici une description en course à pied prise sur le site www.volodalen.com:
"Si vous le voulez bien, mettez-vous assis au sol, jambes tendues devant vous, bras fléchis. Vous y êtes ? Alors commencez un mouvement de va et vient d'avant vers l'arrière et de haut en bas avec vos deux bras pliés. Accélérez le mouvement. Quand vous êtes en phase montante, stoppez brusquement vos bras ! !!
Vous avez décollé n'est ce pas ? Si ce n'est pas le cas recommencez en vous aidant des jambes.
Ce qui vous a fait décoller c'est le transfert d'énergie vers le haut que vous avez fait de vos bras à votre corps en entier. Ce transfert a permis d'alléger votre corps.
Ce transfert se retrouve en course. Selon le sens du mouvement des segments, il peut alléger ou alourdir le corps au moment de l'appui au sol. A cet instant de la course, tout mouvement de la jambe libre ou des bras vers le bas aura tendance à charger le corps. Toute action vers le haut est susceptible de l'alléger et ainsi de faciliter le renvoi."
Si l'on observe le timing du battement deux temps par rapport au mouvement du bras, on peut observer que la synchronisation est la même qu'en course à pied. Le mouvement de bras est en phase avec le moment où l'appui du membre inférieur est le plus fort, comme dans le cas d'une foulée.
Voici une séquence vidéo de Sun Yang.
On peut remarquer comment il structure son battement:
- au moment il s'allonge sur le côté droit, il bat trois fois des jambes: ses deux premiers battement sont effectués de manière classique (la jambe reste plutôt tendue) ; ils sont placés dans un moment où le nageur n'est pas en propulsion avec ses bras; ils sont donc là pour contre-balancer la puissance sinusoïdale des bras (comme dans un battement six temps classique) (comme expliqué plus haut). Mais le dernier battement est fait avec un fléchissement du genou plus important.
- au moment où il s'allonge du côté gauche, il bat une seule fois très fort en pliant encore plus le genou qu'il ne le fait avec l'autre jambe:
Pourquoi un tel mouvement ?
Mon explication est que ce mouvement permet au nageur de s'alléger au moment crucial où il exerce la plus grande force sur l'eau (c'est à dire quand sa main passe à l'aplomb de son épaule). Le mouvement de la jambe fait que le bassin remonte très près de la surface ce qui rend le nageur extrêmement hydrodynamique à ce moment si important. D'ailleurs, c'est tout à fait visible sur la photo (flèche du milieu montrant le bassin).
J'en arrive donc à la conclusion que ce mouvement de pied est l'un des facteurs de l'amplitude (gigantesque) de Sun Yang (seulement 14 cycles sur certaines longueurs en finale du 1500m). Dans son cas, ce battement n'est pas réellement propulsif en soi (conformément aux explications de Didier Chollet) mais il permet une bien meilleure propulsion du bras et donc une très grande amplitude.
Bonne nage !
On peut remarquer comment il structure son battement:
- au moment il s'allonge sur le côté droit, il bat trois fois des jambes: ses deux premiers battement sont effectués de manière classique (la jambe reste plutôt tendue) ; ils sont placés dans un moment où le nageur n'est pas en propulsion avec ses bras; ils sont donc là pour contre-balancer la puissance sinusoïdale des bras (comme dans un battement six temps classique) (comme expliqué plus haut). Mais le dernier battement est fait avec un fléchissement du genou plus important.
- au moment où il s'allonge du côté gauche, il bat une seule fois très fort en pliant encore plus le genou qu'il ne le fait avec l'autre jambe:
Pourquoi un tel mouvement ?
Mon explication est que ce mouvement permet au nageur de s'alléger au moment crucial où il exerce la plus grande force sur l'eau (c'est à dire quand sa main passe à l'aplomb de son épaule). Le mouvement de la jambe fait que le bassin remonte très près de la surface ce qui rend le nageur extrêmement hydrodynamique à ce moment si important. D'ailleurs, c'est tout à fait visible sur la photo (flèche du milieu montrant le bassin).
J'en arrive donc à la conclusion que ce mouvement de pied est l'un des facteurs de l'amplitude (gigantesque) de Sun Yang (seulement 14 cycles sur certaines longueurs en finale du 1500m). Dans son cas, ce battement n'est pas réellement propulsif en soi (conformément aux explications de Didier Chollet) mais il permet une bien meilleure propulsion du bras et donc une très grande amplitude.
Bonne nage !
PS: Si vous souhaitez en faire l'expérience, et reproduire ce mouvement de jambes particulier, je vous conseillerai de le faire avec un tout petit pull-buoy ou une planche (par exemple le Finis Alignment Kickboard) entre vos jambes. L'intérêt est de bloquer vos cuisses et donc de vous concentrer sur le trajet du pied à partir du genou (comme Sun Yang). Il faut que le pull-buoy ne fausse pas l'expérience donc il doit être le plus petit possible.
Commencer par faire le mouvement de jambes en laissant les bras allongés devant vous. Normalement, vous n'allez pas vraiment bougé car le battement réalisé ainsi avec ce genou plié ne génère pas vraiment de propulsion.
Maintenant faites la même chose mais en nage complète avec un battement 2 temps et toujours avec la planche bien calée entre vos jambes. Synchroniser précisément votre battement de sorte qu'il finisse exactement avant le moment où votre main passe sous votre corps (comme Sun Yang sur le cliché ci-dessus) et voyez si vous ne ressentez pas un gain de vitesse et d'amplitude très significatif. Comparer par exemple votre nombre de coups de bras sur une longueur avec et sans cette technique.
Pour beaucoup, effet assuré !
aucun principe physique n'oblige l'intensité de la force Y à vérifier une certaine valeur comparativement à celle de X pour que l'ensemble soit propulseur et heureusement que l'intensité de la force des bras n'est pas plus sinusoïdale que la puissance ainsi fournie ne l'est car sinon la valeur moyenne de l'effet propulseur serait nul...
RépondreSupprimerPour la théorie de l'allègement qui semble bien séduisante à priori, une question demeure : si la traînée est au plus faible au moment de la poussée maximum par une position adéquate du bassin il en découle qu'elle devient plus importante à un moment moins moteur du mouvement, ce qui fait qu'en moyenne la puissance consommée par les frottements fluides reste la même. Et pourtant, j'ai testé le mouvement hier en grandeur nature ( c'est d'autant plus facile que le timing du mouvement est tout à fait naturel !) et le fait est que le gain en vitesse a été tout à fait mesurable eu égard à tous mes compagnons habituels d'entraînement (qui ne devaient tout de même pas être tous à l'arrêt ce jour là !).
le seul souci étant de placer un battement dit "propulsif" entre deux battements qu'on pourrait appeler "de position". ça c'est déjà beaucoup plus compliqué au niveau de la synchronisation d'ensemble,mais ça n'aurait été que la cerise sur le gâteau et je ne désespère pas d'y parvenir afin de pouvoir constater le gain obtenu ( ou non en fonction de l'énergie supplémentaire qui risque d'être demandée ).
En tout cas, je suis heureux que ma remarque concernant l'allègement ne trouve pas sa vérification par l'expérience car cette nouvelle façon de nager entraîne un roulis naturel très important qui rend la nage moins gourmande en énergie, ce qui est peut-être la clé de la solution à cette énigme.
Encore merci pour ce blog qui permet en expérimentant de ne jamais s'ennuyer dans l'eau malgré les allers et retours si routiniers auxquels on n'échappe pas.
Super article, merci ! On a l'impression à la TV qu'il est chaotique au niveau des battements, mais en fait tout est hyper calé.
RépondreSupprimerBonsoir
RépondreSupprimerPourquoi sun yang ne fait il ce battement spécifique que d'un côté alors ?
Cette technique pourrait être rendue symétrique non ?
merci pour votre blog
Daniel
non il le fait bien des deux cotés à la différence près qu'il ajoute deux battements propulseur pour l'un des cotés.
RépondreSupprimerEn fait il intercale ces battements quand il ne respire pas. Quand il se tourne pour respirer il ne met qu'un seul coup de pied, comme sur un battement 2 temps.
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